Eh oui, le handicap est avant tout une construction sociale. Selon les cultures et les époques, on ne l’aborde pas de la même façon.
Michel Panoff a écrit un article sur les « figures handicapantes » chez un peuple de Nouvelle-Bretagne (les Maenge). Il nous illustre plutôt aisément cette dimension sociale et culturelle du handicap. Cela renforce l’idée selon laquelle le handicap n’est pas réductible à la personne...!
Chez les Maenge, comme dans les sociétés occidentales, nous observons certaines conditions à remplir pour répondre aux attentes de la société. Chez ce peuple, il s’agit de :
Voici donc la recette pour avoir "une vie belle et bonne". Des mobilisations humaines et matérielles.
Du fait de caractéristiques "discordantes", certains individus ne pourront pas pleinement satisfaire à ces conditions. Ils ne répondront donc pas aux attentes de la société.
Pour ces "individus déviants", on a donc un environnement social porteur d’obstacles. Cela va entraîner un certain nombre de conséquences sur la vie sociale de ces derniers. Dans le meilleur des cas, ces individus pourront n’être que des « laissés-pour-compte » qui vivotent paisiblement. Mais le plus souvent, ils seront traités en « boucs émissaires vulnérables ». Tous seront victimes de « processus visibles de marginalité et d’exclusion ». Souvent, ils souffriront d’un « abandon social et moral ». S’en suivront alors des « schémas de dépendance » auprès de certains bienfaiteurs.
Chez les Maenge, le handicap survient lors d’une atteinte à l’intégrité. Ils voient en ces figures handicapantes – qu’ils appellent les « Rubbish Men » – la perte de l’essence de leur humanité. Ils n’ont plus d’âme. Tandis que la nature de cette intégrité renvoie davantage à des aspects physiques ou mentaux pour les sociétés occidentales, elle revêt davantage un sens spirituel chez ce peuple.
Qui sont-ils finalement ? Ces « Rubbish Men » sont des individus aux particularités biographiques très diverses. Selon les croyances Maenge, l’intégrité spirituelle peut être affectée avec des dispositions personnelles variées. Ainsi, tout naturellement, on pourra y trouver des « réfugiés », des « orphelins », des « survivants de sous clans éteints ». Mais on y trouvera également des « muets », des « débiles mentaux » ou encore des « petits délinquants ».
L’analyse de cet article met en valeur l’idée que le handicap ne tiendrait plus seulement des caractéristiques individuelles d’une personne mais aussi du système culturel et de l’environnement dans lequel elle vit.
On est donc sur un modèle social du handicap. Dans cette approche :
Ainsi, le handicap est d’abord une conséquence de phénomènes politiques et culturels qui conditionne, même inconsciemment, les réponses sociales apportées aux individus souffrant d’une quelconque différence.
Chez les Maenge, les réponses sociétales apportées à ces individus « frappés de défaillance » peuvent trouver un écho au sein d’autres sociétés. On peut notamment le remarquer quand il s’agit des questions d’exclusion.
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